lundi 9 mars 2009

Les femmes que peignait Renoir







Renoir a dit qu'il n'aimait pas peindre les femmes oisives. Il en a peint quand même, dans une société où les artistes sont ou méconnus ou objet de spéculation, et il faut bien voir que, dans la pratique, ce sont précisément les femmes oisives qui bénéficient des millions que valent ses tableaux et non les bonnes ménagères plus ou moins illettrées qu'il a peintes avec amour. On doit toutefois lui garder reconnaissance d'avoir dit ces choses car ce sont là de grandes paroles qui restent et feront leur chemin. (Léon Gard)




VAN GOGH



Ce qu'il y a de plus intéressant dans Van Gogh, c'est van Gogh lui-même, comme dans Roméo et Juliette ce n'est ni Roméo ni Juliette qui compte vraiment mais Shakespeare. les choses et les gens auxquels il s'intéressait était magnifiés, transposés par un esprit sublime qui se nourissait de ce qu'il rencontrait. Il faut observer que son époque, qui déraillait sur des noms fort médiocres, est restée complètement fermée à son génie. Quant à ses crises de folie, c'est comme il le dit lui-même, "une maladie comme une autre" mais, à choisir, ajoute le pauvre Van Gogh, je n'aurais pas choisi celle-là. Son état physique, en tout cas, n'était pas amélioré par les drogues du tabac et de l'alcool dont il était grand consommateur, y puisant un réconfort passager.






Son oeil de peintre était extraordinaire mais il est fâcheux qu'il ait rencontré des critiques d'art qui l'ont poussé à une abstraction relative. Il n'a jamais été abstrait mais certaines tâches de couleurs stridentes dans ses tableaux, par exemple le portrait du docteur Gachet ou l'épouvantable bleu-outremer de l'église d'Auvers se ressentent d'une théorie de la couleur pour la couleur qui commençait à devenir à la mode.




Voir un autre article de Léon Gard sur Van Gogh, ici : http://www.leongard.com/a_propos_de_van_gogh_220.htm

vendredi 23 janvier 2009








CEZANNE








Clémenceau, Claude Monet et Cézanne



Dans le titre de Gustave Geffroy sur Claude Monet, l'auteur évoque la scène où se trouvaient réunis à Giverny chez Claude Monet : Rodin, Clémenceau, Octave Mirbeau et Gustave Geffroy. Monet avait invité spécialement Cézanne pour lui faire rencontrer ces personnes amies. Geffroy exagère, sans doute, la naïveté de Cézanne en lui faisant dire, les larmes aux yeux : "Il n'est pas fier, Monsieur Rodin, il m'a serré la main, un homme décoré ! " C'est ridicule et c'est faire de Cézanne un "minus" qu'il n'était en aucune façon. La vérité a dû être un peu modifié par Geffroy pour accentuer la drôlerie, mais la psychologie de Cézanne n'y est pas. Cézanne aimait bien Clémenceau dont les réparties à l'emporte-pièce devaient le ravir. Mais il n'était plus d'accord, lui si chrétien, avec l'anti-cléricalisme de Clémenceau. "Je suis faible", disait-il, "seule l'Eglise peut me protéger." Ce qui est là une réflexion d'un grand chrétien, bien digne de Cézanne (Emile bernard : Sur Paul Cézanne).
Mais ce que Geffroy ne dit pas, c'est que Monet, au déjeuner, ayant fait un petit discours qui était l'éloge de Cézanne, celui-ci réagit d'une façon inattendue et lui dit, navré : "Vous aussi, Monet, vous vous moquez de moi." Il partit, furieux. On a le coeur serré de cette scène. Il est évident que Cézanne, ultra-sensible, avait dû beaucoup souffrir dans sa vie : être toujours recalé au Salon de Bouguereau et essuyer une pluie de sarcasmes qui avaient déséquilibré son humeur. Pour nul qu'il soit, du point de vue artistique, le roman de Zola (L'oeuvre), lui fit certainement beaucoup de peine du point de vue sentimental, car l'auteur présente son ami sous les traits d'un pauvre raté : Zola manque de discernement au point d'envoyer son livre à Cézanne, ce qui rendit leur brouille définitive. Son époque a écrasé Cézanne de toutes les façons. D'un mot, il dit tout le drame : "Ce serait drôle qu'un jour j'atteignisse les sommes de Bouguereau et de Meissonier." La vérité lui paraissait invraisemblablement belle, car la vérité de l'histoire est que Bouguereau et Meissonier se sont effondrés et que Cézanne triomphe comme le plus grand peintre de son temps.

Hélas ! qu'on eût aimé moins de souffrance, moins d'amertume envers la critique d'art ! "Un jour disait-il, elle me couvrira d'éloges aussi sots qu'elle me lapide aujourd'hui des plus absurdes méchanceté. Je ne lui en veux pas, je ne la lis plus." A quoi Emile Bernard répondait : "Attendons que quelques toiles de vous se vende un bon prix : ce sera le suprême argument pour une société qui ne connaît pas l'art, et vos compatriotes vous élèveront une statue ou vous salueront bien bas si vous êtes vivant." cézanne n'avait que mépris pour les Aixois ! "Tous mes compatriotes sont des culs (sic) à côté de moi. Je les méprise tous." Cette appréciations pour le moins brutale donnera une idée de l'emportement du caractère cézannien, mais aussi de l'injustice et de l'incompréhension qui l'entouraient.

On a dit beaucoup de choses tendancieuses sur Cézanne : notamment on s'est plu à en faire une espèce de fou naïf. Les littérateurs s'en sont donné à coeur-joie avec ce sujet en or. leurs notes, quand elles sont honnêtes et exactes (Gesrtle Mack), ont toujours un intérêt documentaire, mais leur façon d'expliquer le caractère et la peinture de Cézanne échoue invariablement. On doit faire une exception pour Emile Bernard, qui connut Cézanne intimement et parle de lui en termes humains. Dans son livre Sur Paul Cézanne (Venise 1925), Emile bernard, sans comprendre un esprit aussi extraordinaire, surtout à son époque, écrit ces lignes pleines de bon sens et, malheureusement d'actualité :

Il me reste à flétrir les honteuses imitations de ce maître, les difformités commises en son nom, l'incompréhension totale de ces intéressés pasticheurs. Ceux qui l'ont compris doivent être loués. Mais combien sont-ils qui ont consenti à étudier cette oeuvre et à y voir autre chose que des anomalies ? C'est ainsi qu'il est devenu de mode de mettre les compotiers de travers, d'imiter les serviettes de bois (mais n'est-ce pas Gogol, dans son livre "Les Âmes mortes", qui parle de serviettes bourgeoises si épaisses et si bien repassées qu'elles sont comme des planches ?), de n'avoir point d'aplomb dans un verre et de heurter des pommes plates sur des fonds à fleurs. Les uns n'ont vu en Cézanne que brutalités, ignorance, gaucheries, tons ardoisés, gâchis de pâte, et se sont évertués à ces désastreuses illusions ; les autres n'ont considéré en lui qu'un révolté et ont rêvé de l'être davantage. Peu ont vu sa sagesse, sa logique, son harmonie."

Mais les altérations les plus graves sont les contresens théoriques par lesquels on veut faire de Cézanne le précurseur du Cubisme. On ne voit pas sur quoi se fonde cette affirmation : les oeuvres et les propos de Cézanne, lesquels sont remplis de l'adoration pour la nature... ou les principes de Guillaume Apollinaire, le père du Cubisme ("Les peintres cubistes") où il énonce, au contraire, comme loi fondamentale, une haine farouche pour la nature ? On se demande donc pourquoi l'on a répandu cette légende, sinon parce qu'il fallait au cubisme un précurseur de grande envergure : d'où la nécessité de montrer Cézanne comme un être incohérent qui ne savait pas au juste ce qu'il était... et le besoin de soutenir l'idée que ce qu'il portait en lui était exactement le contraire de ce qu'il croyait.

Il a été de mode de montrer les artistes comme des animaux de foire, des ours dansants, incapables de s'analyser, et dont les véritables intentions sont devinées par les critiques d'art et les faiseurs de livres avec une merveilleuse perspicacité. C'est forcer les choses et témoigner de beaucoup de désinvolture, pour ne pas dire d'insolence. Cézanne n'était pas un "simple d'esprit" bien doué comme malgré lui, tel que la légende veut nous le présenter. Son cas est normal : il avait une des plus grandes distinctions et puissances visuelles qu'on ait jamais connues et que, seule, la nature faisait vibrer. Les formes bizarres, non-abouties de ses "baigneuses" que la légende nous donne comme le couronnement de sa peinture viennent d'une raison pratique : ébloui par la somptuosité de la chair sous les arbres, il ne trouvait aucune femme d'Aix qui consentit à poser nue en plein air et il devait se contenter de jeunes soldats à la baignade. N'ayant pas de mémoire, il imaginait parfois des femmes qui étaient aussi bizarres que ses jeunes soldats. Par rapport à ce qu'il voulait, il est évident que les "baigneuses" correspondent à ce qu'il disait lui-même : "Ce qui me manque est la réalisation."

Aujourd'hui, combien de médiocres se sont nourris du nom de Cézanne en le trahissant ?

Nous n'ignorons pas que, pour beaucoup, le grand peintre de la fin du XIX° siècle est Claude Monet. Il est indéniable que celui-ci était prodigieusement doué. Mais il est triste de dire que, célèbre vers 45 ans, il ne fit pas, à partir de cette époque, des tableaux aussi purs que ceux qu'il faisait au temps des "vaches maigres". On regrette que Claude Monet ait abandonné la figure humaine, où il excellait, pour des "séries" de paysages. Le portrait de "Mme Gaudibert", avec son exquise rose-thé près de la dentelle noire, la "Camille", "Les canotiers d'Argenteuil", "La femme au canapé", "Le Déjeuner" sont très supérieurs aux séries des "Peupliers", des "Meules", des "Cathédrales", des vues de "Venise", aux "Nymphéas". Mais peut-être Monet sentait-il tout cela. Grand admirateur de Cézanne (c'est lui qui acheta un tableau de Cézanne, fort cher pour l'époque), qui dit qu'il ne voyait pas en Cézanne ce qu'il ne voyait pas en lui ?

Ni le caractère, ni la peinture de Cézanne n'ont variés. Les succès tardifs à la fin de sa vie n'ont pas modifié cette âme de bronze.
Il semble que les années ne feront que grandir cette belle figure de la peinture contemporaine.






* Voir d'autres articles sur Cézanne par Léon Gard : http://www.leongard.com/la_verite_sur_cezanne_212.htm








dimanche 9 novembre 2008

BIENTÔT

En attendant de donner vie à ce blog, je renvois au site htt://www.leongard.com sur lequel je m'appuierai souvent.